Eva, le professeur

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Après-midi « jeux de société » avec les jeunes de l’Association En-Temps, par une belle journée d’été 2007. Les personnes que j’ai côtoyées dans le cadre de mon travail dans ce centre d’accueil pour mineurs étrangers isolés, il y a dix ans, nourissent toujours la flamme de mon engagement.

Je m’appelle Eva Lemaire, je suis professeure en éducation et j’ai la chance, depuis cette année, d’être la responsable du Projet Afrique (CSJ, Ualberta). Mes centres d’intérêt académique tournent autour de l’éducation interculturelle et de l’inclusion scolaire, en lien notamment avec l’accueil des élèves issus de l’immigration et, plus récemment, en lien avec les populations autochtones. En 2009, j’ai accompagné le Projet Afrique au Kenya, en tant que chercheure. Ce fut bien sûr une aventure fabuleuse, riche. Mais mon attachement pour l’Afrique et pour l’éducation à citoyenneté globale remonte à l’époque où, en France, je me suis investie pendant plusieurs années comme éducatrice scolaire spécialisée et enseignante de français auprès de jeunes immigrés qui, âgés de 15 à 18 ans, avaient tout quitté  (parents, amis, pays d’origine) pour partir à la recherche d’un avenir meilleur.  Lorsque je pense à l’Afrique, je pense à la jolie Mariam, 16 ans, que j’ai rencontrée à cette époque de ma vie et qui avait fui son pays pour échapper au mariage forcé que planifiait pour elle son père. Je pense à Djelil,  jeune Malien, responsable et travailleur au possible, à qui j’ai dû prendre la main à son arrivée pour lui montrer comment tenir un stylo, lui qui n’avait jamais été à l’école et qui obtiendra quelques années plus tard et avec brio son diplôme en restauration. Je pense à Claude, jeune Angolais intelligent et attachant : à tout juste 15 ans, il venait de sortir du joug d’une famille qui, oui en France, avait fait de lui son esclave domestique. Je pense encore à Landry, 17 ans, Angolais lui aussi, à ses problèmes d’alcool, de drogue, mais aussi à cette rumeur qui lui collait à la peau qu’il avait été enfant-soldat dans son pays. Je pense à Djimmy qui s’est fait arrêter au détour d’un contrôle de police et déporter hors de France alors même qu’il était par ailleurs reconnu comme mineur étranger isolé, jeune en danger et qu’il était à ce titre suivi par les services de l’Aide sociale à l’Enfance. Je pense à tous ces jeunes qui m’ont fait confiance et m’ont raconté les épreuves qu’ils ont bravées dans leur parcours pour rejoindre l’Europe: les amis d’infortune jetés par-dessus bord lors de la traversée de la Méditerranée, les passeurs peu scrupuleux, les réseaux de prostitution les attendant, leur méfiance envers les autorités françaises, policières, judiciaires, éducatives… C’est de ces rencontres uniques, qui m’ont transformée à jamais, que viennent ma passion pour l’éducation à la citoyenneté globale et mon engagement à accompagner les étudiants du CSJ dans le Projet Afrique, une expérience dont j’espère qu’elle sera pour eux aussi transformatrice.

Pour en savoir plus sur les mineurs isolés, cliquez sur cet article.

Marissa: « While we try to teach our children all about life, our children teach us what life is all about. » (Angela Schwindt)

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Je m’appelle Marissa Davey et je suis en troisième année de mon baccalauréat en éducation élémentaire. J’aimerais être enseignante dans une classe d’immersion puisque c’est de ce contexte dont vient ma propre éducation pré-universitaire. J’ai passé mon enfance dans la ville francophone de Beaumont. Bien que je ne sois pas issue d’une famille francophone, vivre à Beaumont m’a donné l’occasion d’apprécier beaucoup la langue française et m’a apporté de nombreuses opportunités dont celles d’étudier en français et de voyager dans des pays francophones. En douzième année, j’ai voyagé en France et en Suisse : cela a été une expérience très enrichissante pour moi et j’espère qu’il en sera de même avec ce voyage au Togo.

J’ai toujours aimé travailler avec les enfants. Je crois donc que ce projet de stage dans une école togolaise serait une expérience très profitable pour moi. J’ai hâte d’interagir avec les jeunes enfants là-bas et de voir comment leur personnalité s’exprimera pendant les temps de classe. Tous les gens que je connais qui ont eu des expériences avec les enfants des pays moins développés disent à quel point ils ont apprécié être entourés de ces enfants, si joyeux, qui savent communiquer leur joie de vivre aux bénévoles. J’espère avoir la chance de connaître cette joie aussi au cours du projet.

Je crois aussi que cette expérience m’aidera aussi à apprécier davantage ce qu’on a comme privilège de vivre au Canada. Le système d’éducation au Canada est très avancé, et j’aimerais en savoir plus sur la façon dont les élèves au Togo apprennent, dans un contexte aussi différent. Je n’ai jamais vécu une expérience comme celle-ci. C’est donc sortir un peu hors de ma zone de confort que de faire ce voyage en Afrique, mais je souhaite aider les enfants là-bas et leur faire découvrir une manière d’enseigner à laquelle ils n’ont peut-être jamais été exposés.

 

Sophie: « M’impliquer en éducation pour une Afrique emancipée et forte de ses diversités »

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Chaque pièce de cette mosaïque est une richesse dont je voudrais que l’Afrique puisse se saisir.

 

Je me nomme Sophie Meunier, j’ai grandi dans une famille africaine qui a une singularité: celle d’avoir des parents qui sont issus de différentes communautés au sein d’un même pays. Dans ce cas de figure, en côte d’Ivoire, les enfants sont éduqués selon les valeurs de l’homme parce que la société est phallocrate. Cependant à la maison, mes parents ont pris un soin particulier à nous inculquer une éducation qui inclut leurs cultures respectives. Le point de vue de ma mère comptait à la maison. Cela m’a permis de développer une conscience féministe. C’est la raison, soit-dit en passant qui m’a amené à vouloir m’investir auprès de la «  Coalition des femmes de l’Alberta » dans le cadre de ce cours. Mais plus globalement, l’éducation que j’ai reçue m’a ouvert l’esprit quant à l’importance d’une éducation plurielle et a forgé une curiosité qui m’a motivée à intégrer le programme en éducation au Campus Saint Jean en automne 2014. À la fin de cet hiver, je serai diplômée et donc prête à exercer le métier d’enseignant qui me passionne tant.

J’ai débuté mon cursus scolaire dans mon pays d’origine. Toutefois, j’ai effectué une partie de ma scolarité en France. À cette période de ma vie, j’ai remarqué qu’il y a des différences éducatives qui existent entre les systèmes scolaires ivoiriens et francais.

Lorsque j’ai entamé le programme en éducation, j’ai rencontré des étudiants des autres pays africains dans ma classe. Au fils des discussions que nous avons eues et avec la formation reçue au Campus, le constat qu’il existe bel et bien des contrastes éducatifs s’est accentué à mes yeux. Mais cette fois la différence ne se situait plus seulement entre la France et la Cote d’Ivoire mais entre l’Afrique et l’Occident.

De mon point de vue, le problème scolaire en Afrique se résume en un manque de ressources éducatives (matériel) et en l’exploitation d’un modèle éducatif qui demeure très impacté par la colonisation. Pour exemple : que gagne un élève ivoirien à apprendre la géographie Européenne dans ses moindres détails lorsqu’il ignore tout sur les pays frontaliers de la Cote d’Ivoire?

Par ailleurs, il me semble que la pédagogie utilisée en Afrique pourrait également être revisitée. La pédagogie actionnelle, où l’enfant est au cœur de son apprentissage et est appelé à agir – pas seulement à mémoriser – est une pédagogie que j’ai découverte lors de ma formation au CSJ et que j’ai aimé appliquer en stage. Je pense que si le système éducatif africain l’adopte et la pratique dans ses écoles, cela permettrait de faire ressortir le potentiel de ses élèves. Dans la mesure où je vais m’engager comme enseignante bénévole dans les écoles togolaises, le Projet Afrique va me permettre de mettre cette idée à l’épreuve.

Megan, Z : « Life is about people, not stuff »

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Je suis une sœur. Je suis une amie. Je suis étudiante. Je suis une athlète. Je suis un aventurier. Mais le plus important est que je suis moi-même. Un petit bout de femme, unique en son genre, qui aime regarder les films, jouer au soccer et sortir avec des amis. Un individu passionné, gentil et drôle.

Je m’appelle Megan Zaremba et j’ai 21 ans. Je suis dans ma troisième année en éducation secondaire avec une majeure en mathématique et une mineure en éducation physique. Je viens d’une famille moitié francophone et moitié anglophone. Après 12 ans d’études en immersion, j’ai obtenu mon diplôme de 12e année en 2013 de l’École Secondaire Beaumont Composite High School. J’ai commencé mon parcours universitaire après avoir pris un an de congé pour travailler et voyager. Je ne regrette pas cette décision parce que cela m’a permis de développer la capacité être seule et cela a cimenté mon amour pour l’aventure et le voyage. À part les voyages, j’aime aussi faire la planche à neige, manger beaucoup de nourriture, aller en camping, être dehors et travailler. Depuis plusieurs années, je travaille à Beaumont Physiotherapy and Sports Injury Clinic comme réceptionniste et assistante.

Dans le passé, j’ai fait deux voyages volontaires au Mexique pour aider quelques familles à construire leur maison. Durant ces voyages j’ai développé une passion pour l’entraide et l’envie d’élargir ma communauté. Je pense que le Projet Afrique est une bonne opportunité de bénévolat qui peut améliorer mes compétences d’enseignante tout en m’amusant et tout en explorant une société assez simple, mais riche en amour et collectivités. Il y a d’autres raisons pour lesquelles je me suis inscrite dans ce cours. De manière générale, j’aime bien avoir l’occasion d’étudier les cas d’égalité et d’inégalité sociale qui existent au Canada. La composante Community Service Learning (CSL) est une bonne occasion d’être impliquée dans ma propre communauté. J’ai choisi de m’investir auprès de Little Warriors. Le bénévolat avec Little Warriors me permettrait de pratiquer mes compétences linguistiques, via la traduction d’un document, tout en apprenant plus concernant l’abus sexuel chez les jeunes. Ces connaissances seront bénéfiques et me serviraient comme future enseignante et parent. Je suis intéressée aussi par le bénévolat en garderie.

Bien que je sois inquiète quant au financement du voyage, j’ai hâte d’avoir l’occasion d’enrichir ma vie avec cette expérience. L’enseignement serait difficile, mais va m’aider à améliorer mes compétences.

 

René, futur enseignant

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Mon nom est René Beauparlant. Je suis en dernière année de baccalauréat en éducation à l’élémentaire. Je compléterai mon dernier stage à Grande Prairie entre le début mars et la fin avril 2017. Quelques jours plus tard, je serai dans un avion avec mes collègues étudiants de la cohorte 2016-2017 du projet Afrique. Nous allons passer trois semaines au Togo et par la suite je poursuivrai mon voyage vers la Côte D’Ivoire avec mon amie Sophie, qui est de la même promotion que moi et qui est originaire du pays. Nous allons séjourner dans sa famille. Ce sera mon tout premier voyage sur le continent africain.

Le cours Éducation à la paix et citoyenneté globale est obligatoire. Il sert de préparation au stage que je vais effectuer dans une école élémentaire togolaise, doublé d’une mission humanitaire où tous les membres de la cohorte vont participer à l’édification d’une structure scolaire, hospitalière ou sanitaire au bénéfice de la population locale. Bien que je n’aie pas choisi ce cours, j’y participe avec enthousiasme puisque j’ai le sentiment que je vais y apprendre beaucoup au sujet de la coopération internationale en général. Cela est tout à fait en phase avec ma volonté de vivre une deuxième moitié de vie sensée, en continuant d’être un modèle d’ouverture et d’aventure pour Jasmine, ma fille de 15 ans.

Je me suis engagé dans le projet Afrique parce que je crois que cela fait partie de mon devoir en tant que futur enseignant. En effet, nos classes albertaines sont de plus en plus diversifiées et de nombreux immigrants africains inscrivent leurs enfants à l’école francophone. J’entrevois ainsi ce périple comme une occasion unique de mieux saisir la réalité immigrante à la source et dès lors mieux accueillir et soutenir la diversité qui enrichit notre système scolaire. Plus encore, j’anticipe ce voyage comme un événement initiatique qui va changer ma façon de voir les choses et peut-être bien orienter mes choix futurs. Je fais partie de l’Association Canadienne pour le Développement de l’Éducation en Afrique (ACDÉA) qui a pour ambition d’ouvrir des écoles africaines suivant le modèle canadien. À 41 ans, l’avenir me semble toujours ouvert et cela me comble de bonheur.

J’ai choisi de faire mon volontariat avec Little Warriors, un organisme qui aide les enfants de 8 à 12 ans victimes d’abus sexuels. Encore ici, j’agis par devoir. Il ne faut pas confondre avec « obligation ». Je prends très au sérieux le rôle de pédagogue que je m’apprête à entreprendre. Si j’ai décidé d’enseigner au primaire, c’est que je suis convaincu que c’est là que je peux rendre les plus grands services à la communauté, tant en tant que modèle qu’en tant qu’éducateur, voire protecteur de l’enfance. Si ce bénévolat me fournit les connaissances pour déceler et prévenir ne serait-ce qu’un cas d’abus parmi les enfants qui seront sous ma responsabilité, l’exercice en vaut mille fois l’effort. L’enfance est précieuse parce que l’enfant est l’avenir. C’est peut-être une formule éculée mais moi j’y crois profondément et c’est parce que je travaille pour l’avenir, pour notre avenir à tous, que je souhaite soutenir une cause qui protège et qui tente de soulager l’enfance. Dans le cadre de mes 20 heures d’engagement auprès de Little Warriors, j’aurai la chance de participer à l’atelier Prevent it!, de visiter le ranch Be Brave – qui accueille en thérapie des jeunes victimes d’abus sexuels – et de participer à la traduction française de matériel de formation. Je pense apprendre des informations essentielles dans le cadre de ma pratique auprès d’une clientèle vulnérable, en plus de découvrir une ressource utile, car elle permet à l’enfance bafouée de poursuivre sa route dans la mesure du possible. J’ai à cœur de mettre toute mon intelligence au service d’une cause si noble.

Pour illustrer ce billet, je souhaitais illustrer ma vision de l’éducation. Finalement, je le trouve polysémique. Il représente à la fois l’importance des modèles, la protection de l’enfance, l’expression de soi, l’ouverture sur le monde ou l’enrichissement qui participe de l’inclusion des autres et qui colore notre monde commun. Et vous, qu’y voyez-vous?